"La culture n'est pas un luxe, c'est une nécessité"

Partant de cette notion fondamentale exprimée par Gao Xingjian, ce blog a pour but de partager les connaissances dans tous les domaines de l'histoire de l'art occidental.

Des périodes antiques à la période contemporaine, le lecteur est invité au voyage par des articles à vocation scientifique, mais accessibles à tous.

S'interroger, historiciser, expliquer en gardant un esprit critique et humaniser l'histoire au travers des productions et oeuvres sont les critères essentiels de cette page. De nouvelles perspectives naissent ainsi du croisement des regards, des conceptions, de la connaissance des artisanats et des arts.

Rédigé par une docteur spécialisée en iconographie, ATER à l'Université de Poitiers, ce blog a également la volonté d'intégrer de jeunes chercheurs passionnés, désireux de partager leurs connaissances et leurs savoirs par la publication d'articles.



" The culture is not a luxury, it is a necessity " This notion expressed by Gao Xingjian, is the foundation for the blog, who aims at sharing the knowledge in all the domains of the art history. From Antique periods to the contemporary period, the reader is invited in the journey by articles with scientific vocation, but accessible to everyone. Wondering, historicizing, explaining by a critical spirit and humanizing the history through the productions and works are the essential criteria of this page. New perspectives arise from the crossing of the glances, conceptions, knowledges. Drafted by a PhD Doctor specialized in iconography, this blog also has the will to join young researchers, avid to share their knowledges by the publication of articles. English summaries will be proposed (see article : the blog evolves - le Blog évolue)


vendredi 27 janvier 2012

Chiharu Shiota à la Galerie Daniel Templon - Chiharu Shiota at Daniel Templon Gallery


Chiharu Shiota, "In Silence", (c) www.chiharu-shiota.com

Les installations spectaculaires de cette artiste japonaise, née en 1972 à Osaka et vivant depuis 1996 à Berlin, sont des art performance accumulant de vieux objets de la vie quotidienne, lui permettant d’explorer les relations entre passé et présent, souvenir et oubli, rêve et sommeil. 

Chiharu Shiota, (c) ineedaguide.blogspot.com
Ses œuvres emmènent le spectateur dans des environnements poétiques, parfois oniriques par l’ajout d’un tissage de cordelettes noires, plus rarement rouges, suggérant le cocon. "Les fils sont tissés l'un dans l'autre. Ils s'enchevêtrent. Ils se déchirent. Ils se dénouent. Ils sont comme un miroir des sentiments" écrit l'artiste. 
La simplicité des matériaux, les tissages en toiles d’araignées, la mise en scène contribuent à des installations troublantes, dont l’impact sur le spectateur lui procure diverses sensations, dérangeantes ou fascinantes. 

Chiharu Shiota, "unconscious anxiety", (c)  www.chiharu-shiota.com

Après une exposition très remarquée en 2011 à Maison Rouge, l'artiste revient exposer à Paris, à la Galerie Daniel Templon, du 7 janvier au 18 février 2012 [1].


Site de l'artiste : Chiharu Shiota



The spectacular installations of this Japanese artist, born in 1972 in Osaka and living since 1996 in Berlin, her art performances are accumulating old objects of the everyday life allowing her to investigate the relations between past and present, memory and forgetting, dream and sleep.
Her works take the spectator in poetic, sometimes dreamlike environments by the addition of a weaving of black cords, more rarely red, suggesting the cocoon. " The threads are weaved the one in the other one. They become muddled. They tear. They come loose. They are as a mirror of the feelings " written Chiharu Shiota.
The simplicity of materials, the weavings in cobwebs contribute to particular installations, which impact on the spectator gets diverse sensations, disturbing or fascinating.
After an very noticed exhibition  in 2011 at the Maison Rouge, the artist expose again in Paris at the Daniel Templon Gallery, from January 7th till February 18th, 2012. 
Chiharu shiota's website : Chiharu Shiota



mardi 17 janvier 2012

Un site internet consacré à Pompéi, une autre vision. A web site dedicated to Pompéi, another vision


Base de données éditée par la Scuola Normale Superiore di Pisa, collectant images et textes sur l’interprétation et la perception des monuments pompéiens depuis 1748, date de découverte du site, jusqu’aux débuts du XXe siècle.


Database edited by the Scuola Normale Superiore di Pisa, collecting images and texts on the interpretation and the perception of monuments of Pompeï since 1748, date of discovery, until the beginning of the XXth century.

mardi 10 janvier 2012

Cycle d’articles sur l’iconographie de l’enseignement (XIe-XVe siècle) : Article 2, quelques principes de l’iconographie christique


English translation comming soon. 


L'importance du thème du roi biblique enseignant a été démontrée par le précédent article, lequel concluait par une réflexion sur la notion de préfiguration du Christ, incarnée par Salomon. L’iconographie christique reste, bien entendu pour l’image chrétienne, l’archétype majeur des représentations de l’enseignement au Moyen Age.

L’image du Christ enseignant est une des plus anciennes connues. Présente dans l’iconographie paléochrétienne, on en trouve un exemple dans la catacombe romaine de Domitille (IVe siècle). 
Rome, catacombe de Domitille, peinture murale, IVe s. (c) icones-grecques.com
Vêtu à l’Antique tel un philosophe au milieu de ses disciples, il leur adresse le message qui n’est pas le sien, mais celui du Père (« cette parole qui vous entendez, elle n’est pas de moi mais du Père qui m’a envoyé » Evangile selon saint Jean XIV, 24), comme cet exemple ci-après le traduit bien. Le Christ, debout, s'adresse aux disciples assis à ses pieds, tandis que le Père muni du globe et faisant le geste de bénédiction apparaît dans le ciel étoilé. 

Christ enseignant les Apôtres, Bréviaire romain, XVe s., lettrine, Clermont-Ferrand

Outre l'enseignement aux Apôtres, l’iconographie christique est également marquée par le thème du Christ et des Docteurs. L’iconographie met l’accent sur la vocation de prophète et de Fils de Dieu, un enfant intelligent capable de mener une réflexion avec des adultes. Ces images sont comme un prologue de sa vie future. Selon le texte biblique (Evangile selon saint Luc II, 41-50), Joseph et Marie se rendaient chaque année à Jérusalem pour Pâques. Alors âgé de douze ans, Jésus resta au Temple en échappant à la vigilance de ses parents. Ils l’y retrouvèrent trois jours plus tard, assis au milieu des docteurs, les écoutant et les interrogeant.  En guise de réponse à sa mère inquiète, Jésus répondit : « Pourquoi donc me cherchiez-vous ? Ne saviez-vous pas que je dois être dans la maison de mon Père ? » [1]
Les représentations de cet épisode reprennent les codes énoncés précédemment pour l'iconographie de Salomon, avec quelques éléments supplémentaires à remarquer. Si Jésus est majoritairement assis sur la gauche de l’image, sur un siège, les Docteurs sont eux aussi assis sur un élément mobilier. 
Jésus et les Docteurs, Summa Aurea (droit canon),  initiale I du livre 3, Nord ou Est de la France, XIVe s, Troyes B. m. ms. 97, f. 177 (c) IRHT

Contrairement à l’iconographie de l’enseignement de Salomon s’adressant à Roboam, les auditeurs sont plus que des élèves. Plus précisément, ils ne sont pas des élèves. Ils sont Docteurs, c'est-à-dire savants et philosophes. Ils entament un débat avec Jésus, qu’ils ne considèrent non pas comme un maître mais avec qui ils entrent dans une discussion vive. Le plus souvent représenté comme un enfant, il s'adresse à eux afin d'obtenir des réponses à ses questions, tout en soulevant des points important de la religion. 

Jésus et les Docteurs, Heures de Sainte-Agnès de Delft, Pays-Bas, 1450-1460, Romorantin B. m. ms.  2, f. 13v (c) IRHT
Les gestes le traduisent : à la miniature de Romorantin (ci-dessus), un des docteurs fait le geste du comput digitatis (il énumère les arguments en comptant sur les doigts) tandis que d'autres réfèrent aux livres afin de répondre à l'enfant, assis en majesté au centre de l'image ; à l’initiale du manuscrit de Troyes (ci-dessous), un des savants pose la main sur sa cuisse, dans un geste d’affirmation de son idée tandis qu’un autre point l’index gauche et lève la main droite dans un mouvement signifiant la discussion animée. Le Christ, lui, reste impassiblement centré sur le Livre, posé ostensiblement sur les cuisses. Les fondements de son enseignement, selon la religion chrétienne, y sont consignés. La hampe verticale de l'initiale I permet à l'enlumineur de séparer deux sphères, deux mondes, celui du Christ et celui des savants. 
Jésus et les Docteurs, Summa Aurea (droit canon), initiale I du livre 3, Nord ou Est de la France, première moitié du XIVe s, Troyes B. m. ms. 99, f. 158 (c) IRHT

Habituellement, cependant, l’iconographie du thème représente l’Enfant assis au centre d’un hémicycle composé de savants, la Vierge arrivant parfois accompagnée de Joseph. L'iconographie rappelle ainsi les scènes du Christ entouré du collège apostolique, dont l'ivoire du VIe siècle présenté ci-dessus est un exemple. De thème différents (enseignement des Apôtres ; discussion avec les Docteurs) et de chronologie bien distinctes (9 siècles les séparent), l'iconographie reprend pourtant les mêmes codes, les mêmes principes, et finalement, un message similaire de transmission du savoir. 
Giovanni Toscani, Jésus et les Docteurs, panneau de prédelle, tempera sur bois,  1427-1430,  Philadelphie, Musée d'Art

Le prochain article montrera, à la lumière notamment d’un panneau exposé dans l’exposition Fra Angelico et les Maîtres de la Lumière (Paris, Musée Jacquemart-André), comment des correspondances iconographiques s’établissent entre l’image christique et la représentation de l’enseignement de théologiens.

Pour de plus amples recherches sur les scènes de la vie intellectuelle dans l’art paléochrétien, voir l’article de Paul-Albert Février [2] 

Chrystel Lupant