Iconographie de la Cuisine et des Arts de la table
Sandrine Krikorian, Docteur en Histoire de l’Art à l’Université de Provence
(Aix-Marseille I).
La réputation de la cuisine française de par le monde n'est plus à faire. Mais comment est-elle née ? En effet, si cette réputation est établie, qui sait que c'est durant les XVIIe et XVIIIe siècles qu'elle se met en place et prend son essor pour en arriver là ? C'est un sujet passionnant que j'ai eu la chance et le plaisir d'étudier lors de mes études. de ma maîtrise jusqu'à mon doctorat, soit environ huit ans de recherches. J'ai travaillé sur l'iconographie de la cuisine et des arts de la table durant l'Ancien Régime dans le royaume de France, plus précisément du début du règne de Louis XIII (1610) à la Révolution française (1789).
Dans le domaine de la recherche scientifique, c'est un sujet qui est souvent traité dans certaines disciplines des sciences humaines que sont l'histoire, l'anthropologie, la sociologie, etc. A l'inverse, peu nombreuses sont les études sur cette question en histoire de l'art, ou du moins concernent-elles la plupart du temps la nature morte ou les objets d'orfèvrerie et de céramique. Dans cette discipline, le principal ouvrage est le catalogue d'exposition intitulé Versailles et les tables royales en Europe qui s'est déroulée en 1993 dans le château de Versailles, auquel on peut ajouter les actes du colloque qui se sont déroulés autour de cette exposition (et qui ont été publiés dix ans après). Ce sont deux ouvrages de référence (auxquels on peut ajouter quelques études ou articles publiés ponctuellement) qui donnent un aperçu de ce qu'étaient la cuisine, la gastronomie et les arts de la table français durant ces deux siècles.
Cependant, aucune étude globale sur cette question de l'iconographie culinaire n'avait jamais été réalisée auparavant. J'ai effectué un travail de dépouillement et de recensement, qui tend vers la plus grande exhaustivité possible. J'ai pu collecter (redécouvrir ou mettre au jour) un ensemble de plus de 1500 oeuvres (peintures, gravures, objets de céramique, tapisserie, etc.) liées au sujet. Et c'est l'étude de ce corpus iconographique, analysé de façon croisée avec les sources manuscrites (archives) et imprimées (j'ai travaillé sur environ 500 ouvrages publiés au XVIIe et XVIIIe siècle), qui m'a permis de proposer ce travail d'histoire de l'art (auquel sont insérées des méthodes d'analyse issues des autres sciences humaines).
Sandrine Krikorian
le 9 octobre 2011
Publication de thèse :
KRIKORIAN Sandrine, Les Rois à Table. Iconographie, gastronomie et pratiques des repas officiels de Louis XIII à Louis XVI, Aix-en-Provence, Presses Universitaire de Provence, collection Le temps de l’Histoire, 2011 (publication en décembre 2011).
16 x 24 cm, 230 pages, ISBN 978-2-85399-801-7, 23 €
Couverture : Charles Andre van Loo (1705‑1765), Repos pendant la chasse, Paris, Louvre, © 2011, photo Scala Florence.
Cet ouvrage présente une vision globale des repas officiels des souverains français de l'Ancien Régime. de la préparation culinaire à la décoration du lieu et de la table en passant par les repas et l'analyse des comportements et des goûts de l'époque, l'étude se situe à la limite entre histoire et histoire de l'art ; il s'agit d'une étude pluridisciplinaire se fondant principalement sur l'iconographie et complétée par des sources manuscrites et imprimées. Cette interdisciplinarité, incluant différentes disciplines et méthodologies des sciences humaines, permet de traiter plusieurs aspects : les coulisses des repas (métiers, préparation culinaire et nouvelle gastronomie française), les repas et leur déroulement (étiquette, civilité, service "à la française", convives, faste et apparat), mais aussi la décoration de la table (lieu des repas, tables, accessoires et mets).
Bibliographie de Sandrine Krikorian
- Les Rois à table. Iconographie, gastronomie et pratiques des repas officiels de Louis XIII à Louis XVI, Presses Universitaires de Provence, Le Temps de l'Histoire, 2011 (à paraître en décembre)
- Études d’iconographie culinaire et conviviale dans la France des XVIIe et XVIIIe siècles : pratiques et manières de table, objets, goûts et représentations, thèse de doctorat, sous la direction de Martine Vasselin, Université de Provence, 2007 (résumé en français et anglais ci-joint).
L'iconographie des arts de la table en France aux XVIIe et XVIIIe siècles est constituée de composantes variées : préparation culinaire, ustensiles de cuisine, consommation des mets, déroulement et diversité des repas, décoration du lieu et de la table, accessoires de table. Transcrits sur des supports variés et dans des genres divers, ces thèmes et sujets se reflètent les uns les autres et créent ainsi des effets de miroir qui participent à la mise en scène de la table qui devient un lieu de spectacle. Pratiques sociales et historiques et valeurs esthétiques se mêlent et constituent les deux aspects de ces images qui à la fois imitent le comportement, les goûts, les pratiques alimentaires et artistiques des commanditaires et spectateurs (gastronomie, civilité, sociabilité, intimité, galanterie, libertinage, goût pour la vie en plein air, la chasse, l'exotisme, la littérature, les arts scéniques) et, par leur existence répétée et reflétée, incitent également les convives à se conformer à ce qu'ils voient notamment par la mise en appétit de leurs sens.
Iconographic representation of the art of the dining table in France in the seventeenth and the eighteenth century.
Iconographic representation of the art of the dining table in France in the seventeenth and the eighteenth century is composed of various elements : culinary preparation, cooking ustensils, consumption of dishes, the diversity of meals and table manners, decoration and table ornaments. Transposed on a variety of models and in different forms and formals, those themes and subjects by their interrelations create mirror effects which transform the decoration of the dining table into a theatrical show. Social and historical mores and aesthetic considerations blend and determine the two aspects of these images which at once determine the behaviour, taste and practice of those who ordored such works of art and of spectators (gastronomy, civility, sociability, intimacy, gallantry, libertinage, taste of the outdoor life, hunting, exoticism, literature, visual arts) but also, by their repetition and reflection, incite guests to conform to what they see by whetting their appetite through their senses.
- « Des plaisirs de la chère aux plaisirs de la chair : le dérèglement des sens dans l'iconographie des Contes illustrés de La Fontaine », éditions du CTHS, 132ème Congrès, Arles, 2007 (à paraître).
- « La table du roi dans l'image populaire : les repas de Louis XIV dans les almanachs », éditions du CTHS, 132ème Congrès, Arles, 2007.
- « Pour une interprétation littéraire et morale de l'iconographie des repas populaires français des XVIIe et XVIIIe siècles à travers les œuvres de Bourdon et Greuze », éditions du CTHS, 131ème Congrès, Grenoble, 2006.
- « Nourriture et arts de la table à travers deux romans du XVIIe siècle illustrés au siècle des Lumières: le Don Quichotte de Cervantès et Le Roman comique de Scarron », in Food and History, Brepols Publishers, 2005, vol. 3, n° 1.
Coucou !
RépondreSupprimerMerci pour l'article. Ça me fait très plaisir de publier sur ton blog ;)
Bises
C'est avec plaisir.
RépondreSupprimerBises,
Chrystel